Interview : Professeur Patrice Queneau De l'academie de médecine
« Les médicaments tuent plus que les accidents de la route »
A quoi ou à qui imputer les accidents médicamenteux ?
Il faut être prudent. Si l’on jette la pierre aux uns ou autres, médecins, laboratoires, pouvoirs publics, malades… on n’arrive à rien. C’est un domaine extrêmement complexe. Beaucoup de paramètres entrent en ligne de compte.
Lesquels, par exemple ?
De nombreux malades viennent aux urgences parce qu’ils n’ont pas ou mal respecté leur prescription. Par exemple des insuffisants cardiaques qui font un œdème aigu pulmonaire parce qu’ils ont arrêté leur diurétique.
Source : http://sciencesetavenirmensuel.nouvelobs.com/p718/articles/a325396.html
A-t-on une estimation du nombre de décès liés aux médicaments en France ?
Difficile de donner un chiffre exact. Il se situe probablement dans une fourchette de 10 à 30 000 par an. Bien davantage que les accidents de la route. Or la moitié, voire les deux tiers, sont évitables.
De quelle façon ?
Le malade doit être bien informé par le médecin. Les raisons pour lesquelles il lui prescrit un traitement anti-inflammatoire par exemple, quelle sera sa durée, les précautions à prendre. Le pharmacien devrait également jouer un rôle important dans le contrôle. Actuellement, sa fonction est trop minorée.
La formation des médecins est-elle suffisante ?
On a fait des progrès, mais on doit aller plus loin. Auparavant, la formation à la thérapeutique était trop théorique. Aujourd’hui, un étudiant en médecine ne peut achever son deuxième cycle sans avoir travaillé sur la thérapeutique. Il faudrait terminer les études de médecine par un véritable permis de prescrire.
Et du côté des patients ?
Je plaide pour une formation citoyenne. Il faudrait qu’on apprenne à l’école ce qu’est un médicament. De même, il est nécessaire de savoir ce qu’une trousse médicale doit contenir. Le progrès thérapeutique moderne donnera des résultats décuplés dès lors que le citoyen comprendra bien le sens et l’objectif d’un traitement, ses dangers et ses limites.
De nombreuses personnes pratiquent l’automédication. Qu’en pensez-vous ?
On peut se soigner soi-même, mais en respectant des limites de sécurité. Prendre un traitement pendant quelques jours pour un mal de tête, c’est normal. Mais si le mal perdure, il faut consulter un médecin et non pas additionner les médi-caments. Halte à la « cafouillo-thérapie » !
Quelles sont les personnes qui doivent être les plus vigilantes ?
Les malades à risques : insuffisants rénaux, cardiaques, hépatiques… de façon générale toutes les personnes qui prennent beaucoup de médicaments. De même que les femmes enceintes et les enfants.
Le Pr Queneau est l’auteur de le Malade n’est pas un numéro !, Odile Jacob. G. H.
Sujet: Ceci est moins bon pour la santé 
Jeu 1 Mar - 13:26
